• Shrî Nisargadatta Maharaj

    Shrî Nisargadatta Maharaj
    Shrî Nisargadatta Maharaj ? Un personnage hors du commun. Il reçoit à l'entresol de sa maison. Une échelle de meunier conduit au sanc­tuaire. La chambre ne contient guère plus de 20 personnes à la fois. Près de l'étroite baie grillagée, Maharaj vit, assis en tailleur. Il fume des beedies, 4 ou 5 bouffées et la cigarette est vivement jetée dans un pot en cuivre. L'encens se consume à foison. Sa Présence fait surgir un espace : l'océan. On est au coude à coude, mais jamais d'oppression, malgré l'exiguïté des lieux. Maintenant, le public est plongé dans un mutisme méditatif : les questions sont encore volutes, le cri du cœur chemine dans le silence.

    La spontanéité de Maharaj peut nouer les langues, épaissir l'émotivité jusqu'à l'état de sang caillé. Jamais je n'ai rencontré un guru qui dégage une telle puissance vitale ! Ses yeux sont de feu noir, ils vous percent sans vous jauger, leur acuité est totale.

    Son énergie existe, une énergie libre. Une aisance si physique qu'on en subit la contagion : on se sent hissé vers une respiration plus large, vers une détente, mais en même temps, on perçoit ses propres aspérités, on se découvre des courbatures centenaires.

    L'homme est vivant en diable : il scande sa réponse (les mots crépitent) en martelant sa cuisse du plat de la main. Il peut lever les bras au ciel et les agiter comme deux sémaphores, ou bien exploser de rire, littéralement. Il peut encore houspiller l'assistance qui, du coup, en avale langue et quant-à-soi.

    « Posez des questions, nous sommes là pour parler, pas pour dor­mir ! Sinon, allez-vous-en ! »

    De telles sorties incitent les auditeurs à se terrer comme des lapins quand le tonnerre tire le canon, ou à aplatir le padmâsana (1) jusqu'au chapati (2). Soit. Pourtant, où est l'agressivité ? Où est la hargne ? Je n'en ai trouvé miette.

    On le dit « réalisé ». Il dit « Je suis ». II ne dit rien d'autre. Il ne vit rien d'autre. « Il est ». Il a la vigueur du fait nu : Une vérité si incandescente qu'elle effraie. Maharaj n'est pas un tiède. « Je ne suis pas ce corps », dit-il, « Je suis ».

    Ce sont des mots Ce sont des mots sans verbalisme. C'est la transmission d'une expé­rience et celui qui parle, c'est le Témoin de cet état.

    (1)  padmâsana : la position du lotus.

    (2)  chapati : crêpe indienne (notes de la rédaction).

     

     Chez Nisargadatta Maharaj par Alain Porte

     

     

    Question: Avons-nous la permission de demander comment vous vous êtes réalisé ? 

    Maharaj: Dans mon cas, ce fut quand même très simple et facile. Avant de mourir, mon Gourou, m’a dit : « Crois-moi, tu es la Réalité Suprême. Ne doute pas de mes paroles, ne sois pas incrédule. Je te dis la vérité. Sers-toi en. » Je ne pouvais pas oublier ses paroles et en n’oubliant pas – je me suis réalisé.

     

    Q: Mais qu’étiez-vous en train de faire?

    M : Rien de spécial. Je vivais ma vie, exerçais mon commerce, voyais ma famille, et je consacrais chaque moment libre à me rappeler de mon Gourou et de ses paroles. Il mourut aussitôt après et je n’avais que sa mémoire sur laquelle me rabattre. C’était suffisant.

    Lorsque j’ai rencontré mon Gourou, il m’a dit: «Tu n’es pas ce pour quoi tu te prends. Trouve ce que tu es. Surveille l’impression «Je suis», trouve ton Soi réel. » Je lui ai obéi, parce que j’avais confiance en lui. J’ai fait ce qu’il m’avait dit. Je passais tous mes temps libres à me regarder en silence. Et quelle différence cela a fait, et combien vite ! Çà n’a pris que trois ans pour réaliser ma vraie nature. Mon Gourou est décédé peu après que je l’ai eu rencontré, mais cela n’a fait aucune différence. Je me suis rappelé ce qu’il m’avait dit et j’ai persévéré.

    Q: (un visiteur différent) – Dites-moi s’il-vous-plaît, quel est le plus court chemin vers la réalisation ?

    M : Aucun chemin n’est court ou long, mais quelques personnes sont plus sérieuses et d’autres moins. Je peux te parler de moi. J’étais un homme simple, mais je faisais confiance à mon Gourou. Ce qu’il m’a dit de faire, je l’ai fait. Il m’a dit de me concentrer sur «Je suis» - je l’ai fait. Il m’a dit que j’étais au-delà de tout ce qui est percevable et concevable – j’ai cru. Je lui ai donné mon cœur et mon âme, mon attention entière et tout mon temps libre (je devais travailler pour garder ma famille en vie). La foi et l’application sérieuse m’ont amené à réaliser mon Soi en moins de trois ans. Vous pouvez choisir n’importe quelle façon qui vous convient, votre sérieux déterminera la vitesse du progrès.

    Q: Cela a dû être la grâce et le pouvoir de votre Gourou ?

    M : Ses paroles étaient vraies et ainsi elles se sont réalisées. Les mots vrais se réalisent toujours. Mon Gourou n’a rien fait ; ses paroles ont agi parce qu’elles étaient vraies. Quoi que j’aie pu faire venait de l’intérieur, sans demande et sans attente.

    Q: Le Gourou a débuté un processus sans n’en prendre aucune part?

    M : Dis-le comme tu préfères. Les choses arrivent comme elles arrivent – qui peut dire pourquoi et comment ? Je n’ai rien fait délibérément. Tout est venu de lui-même – le désir de laisser aller, d’être seul, d’aller à l’intérieur.

    Q : Vous n’avez donc fait aucun effort ?

    M : Aucun. Croyez-le ou non, je n’avais même pas hâte de me réaliser. Il m’a seulement dit que je suis le Suprême et puis il mourut. Je ne pouvais tout simplement pas ne pas le croire. Le reste s’est produit de lui-même. Je me suis vu changer – c’est tout. À vrai dire, j’étais étonné.

    Mais un désir de vérifier ses paroles se leva en moi. J’étais tellement certain qu’il ne pouvait avoir menti, que j’ai senti devoir réaliser l’entière signification de ses paroles ou bien mourir. Je me sentais assez déterminé, mais sans savoir quoi faire. Je passais des heures à penser à lui et à son assurance, sans argumenter, mais seulement en me rappelant ce qu’il m’avait dit.

    Q : Que vous-êtes-t-il arrivé alors ? Comment avez-vous su que vous êtes le Suprême ?

    M : Personne n’est venu me le dire. Ni même de l’intérieur. En fait, c’était seulement au début quand je faisais des efforts, que je passais à travers d’étranges expériences ; voyant des lumières, entendant des voix, rencontrant des dieux et déesses et conversant avec eux.

    Dès que le Gourou m’a dit : «Tu es la Réalité Suprême», les visions et les transes cessèrent et je devins très calme et simple.

    Je me sentis désirant et sachant de moins en moins, jusqu’à ce que je puisse dire dans un étonnement complet: «Je ne sais rien, je ne veux rien».

    Q : Étiez-vous réellement libre de désir et de connaissance, ou vous faisiez-vous passer pour un jnani (maître ascensionné) d’après l’image qui vous fut donné par votre Gourou ?

    M : On ne me donna aucune image, pas plus que j’en avais une. Mon Gourou ne m’a jamais dit à quoi m’attendre.

    Q : Plus de choses peuvent vous arriver. Êtes-vous à la fin de votre voyage ?

    M : Il n’y a jamais eu de voyage. Je suis, comme j’ai toujours été.

    Q : Quelle était la Réalité Suprême à laquelle vous étiez supposée parvenir ?

    M : Je n’étais pas désappointé, c’est tout. J’étais habitué à créer un monde et à le peupler – maintenant je ne le fais plus.

    Q : Où demeurez-vous alors ?

    M : Dans le vide au-delà d’être et de non-être, au-delà de la conscience. Ce vide est aussi plénitude ; ne me plaignez pas. C’est comme un homme qui dit : «J’ai fait mon travail, il n’y a plus rien à faire».

    Je ne vois aucune différence entre vous et moi. Ma vie est une succession d’événements, tout comme la vôtre. Je suis seulement détaché et vois le spectacle passant comme un spectacle passager, tandis que vous demeurez collé aux choses et vous vous déplacez avec elles.

    Ayant réalisé que je suis un avec, et cependant au-delà du monde, je suis devenu libre de tout désir et de peur. Je n’ai pas raisonné que je devrais être libre – je me suis retrouvé libre – subitement, sans le moindre effort. Cette liberté de désir et de peur est demeurée avec moi depuis lors. Une autre chose que j’ai remarquée est que je n’ai pas besoin de faire d’effort ; l’action suit la pensée, sans délai ni friction. J’ai aussi trouvé que les pensées deviennent auto-suffisantes : les choses tombaient en place doucement et correctement. Le changement principal fut dans l’esprit ; il devint immobile et silencieux, répondant rapidement, mais sans perpétuer la réponse. La spontanéité devint un mode de vie, le réel devint naturel et le naturel devint réel. Et  par-dessus tout, une affection infinie, un amour, sombre et tranquille, rayonnant dans toutes directions, enveloppant tout, faisant devenir tout intéressant et joli, significatif et prometteur.

    Q : Vous donnez une certaine date à votre réalisation, signifiant que quelque chose vous est arrivé à cette date.  Que s’est-il produit?

    M : L’esprit cessa de produire des événements. L’ancienne et incessante recherche s’arrêta – je ne voulais rien, n’attendais rien – n’acceptais rien comme m’appartenant.

     

    «Quand je regarde à l’intérieur et vois que je ne suis rien, c'est la sagesse.

    Quand je regarde à l’extérieur et vois que je suis tout, c'est l'amour.

    Et entre les deux ma vie s'écoule»

    Nisargadatta Maharaj

     

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